PREAMBULE

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Le présent texte se veut être à la croisée de plusieurs histoires dont beaucoup seront l’objet même des pages qui suivent. La première d'entre elles concerne la genèse non pas de ces pages mais du sujet de ces pages. L’histoire, peut être la mienne sur le sujet, débute en 1994 où j’ai créé mon site web (adresse à ce jour : www.ecriture-art.com), et c’était en fait les tous débuts en France de l’ère Internet. L’objet des pages web que j'avais mises en ligne étaient de présenter entre autres les littératures savamment construites, essentiellement oulipiennes, mais pas uniquement, et, quoi qu'il en soit, issues de la littérature contemporaine. Le livre de Georges Perec, La Disparition, ou celui de Raymond Queneau,100 000 milliards de poèmes sont, il est vrai, les représentants les plus connus du grand public. J’avais aussi conçu une page sur Luigi Serafini et son livre « Codex Seraphinianus », édité et publié par Franco Maria Ricci, préfacé par Italo Calvino, dont l’éditeur, par son seul nom, est déjà une valeur de l’art, de bibliophilie et de la littérature. Le Codex Seraphinianus est un livre assez peu connu du grand public voire même de ceux qui s’intéressent aux langues en général,  écrit dans une langue inconnue et/ou inventée. Nous dévoilerons naturellement par la suite le contenu de ce livre admirable tant sur le plan graphique que conceptuel. Ce site internet sur les littératures cachées et connexes a évolué au fil des ans pour être un centre de curiosités en littératures complexes, de toutes époques, pour en faire des itinéraires de découverte, de questionnement et d ‘amusement. Au début des années 2000, bien après que ce site web personnel ait été lancé, j’ai reçu un message électronique (par newsgroup interposé) d’un anglophone (australien si mes souvenirs sont bons) me demandant si d’une part je connaissais le « manuscrit Voynich », et si d’autre part j’étais intéressé d'apporter ma contribution à un groupe de travail international, informel mais existant, sur le déchiffrement de ce manuscrit médiéval.

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Mes débuts furent d’apporter de petites contributions, de lire ce qui était écrit, de répondre à des questions, ou du moins d’apporter des remarques complémentaires. Ma première idée ensuite, après avoir parcouru les travaux des différents chercheurs, fut de conclure qu’il fallait construire une méthode de déchiffrement complémentaire à celle construite jusque là, laquelle était résolument tournée vers la technique, le déchiffrage et l’analyse quantitative. Il y avait assez peu de place réservée à une étude construite, même qualitative, intuitive, psychologique, graphique, picturale et historique. Il était impératif d’être rigoureux, constructif et « historique » dans la démarche qui elle aussi se devait d’être scientifique. Ne pas être redondant à chaque étape pour résoudre ce manuscrit mais apporter des nouveaux élements par l’approche globale, holistique. C’est là où l’informatique ou du moins des outils collaboratifs étaient utiles et nécessaires. Les outils de mapping ont vu ensuite le jour, et personne auparavant n’a eu l’idée d’utiliser cette méthode globale. Le manuscrit Voynich fut donc par mes soins « cartographié » et ce que l’on en savait afin désormais de ce concentrer sur l’essentiel, en ayant la vision interconnectée, et oubliant le moins possible des données ou détails utiles à la compréhension globale.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, l’histoire écrite sur ces pages est aussi une contribution, même modeste, à la littérature du moyen âge, période à laquelle ce manuscrit a probablement été écrit, mais aussi contemporaine car issue de l’informatique, de la cryptographie et des méthodes interprétatives basées sur l'image (ici, un hommage naturel à Frederico Zeri et son livre "Derrière l'image"). On passera ainsi de l'an 1400 à 2015 dans un tunnel temporel à la fois long et court. Long car cela représente plusieurs siècles d'écart, et court car notre société de l'information réduit l'espace et le temps dans un horizon d'une proximité permanente, de par les avances historiques et technologiques.

Ce manuscrit Voynich s’impose de nos jours comme une solide énigme cryptographique où, à l’ère des ordinateurs les plus puissants, seule la méthode de l’esprit scientifique peut contrer les programmes de déchiffrement les plus avancés. Ce manuscrit peut faire penser au Théorème de Fermat, qui pendant plus de 350 ans est resté sans solution, jusqu’à ce qu’en 1991, un brillant mathématicien découvre, seul, les solutions de ce théorème. Des mathématiciens du monde entier ont cherché des solutions au théorème de Fermat, construisant brique par brique des fondations solides pour qu’un nouvel édifice fut suffisamment solide. Ma contribution dans la recherche sur le manscrit Voynich est une pierre à un nouvel édifice, à charge au temps, aux génies, aux passionnés, aux idées de continuer et d’enrichir ce travail d'une part individuel de l’auteur, et collectif par représentation de tous ceux, qui dans le monde, grâce notamment à Internet écrivent aussi sur le sujet.

Il importe, à notre avis, que soit exposées clairement, avec toutes les explications adéquates, les étapes de construction du présent texte, et de ne pas laisser le lecteur découvrir la trame par la seule table des matières.

L’introduction évoquera de façon plus précise ce qu’est le manuscrit, mais aussi le contexte historique de l’auteur de ce manuscrit. L’intérêt d’un livre et son pourquoi permettront au lecteur de se faire une première idée de la « puissance » de ce manuscrit si atypique.

Dans un second temps, c’est à l’histoire même du manuscrit vers laquelle nous nous tournerons. Histoire de l’auteur, celle du manuscrit et aussi de sa vie, celle le nommant « manuscrit Voynich ».

La description du manuscrit serait à la fois aisée et difficile, mais ce troisième temps nous permettra, grâce aussi aux planches, de cerner l’écriture, les illustrations, et l’organisation générale des 250 pages du manuscrit.

Une fois que le lecteur aura perçu la difficulté de lecture du manuscrit, il lui faudra, avant d’aller plus loin, avoir de bonnes notions sur les codes secrets, et nous balayerons alors une histoire rapide des codes, des écritures secrètes, et du déchiffrement pour mettre en lumière ce qui a existé du XIVe au XVIe siècle.

Dans une cinquième étape, ce sont les techniques de déchiffrement qui seront présentées. Celles généralistes, même si elles sont complexes, mais aussi celles utilisées dans le déchiffrement de ce manuscrit. L’axe suivant sera de présenter d’autres langues inconnues.

Mais ce sera avec un exemple contemporain, celui du Codex Seraphinianus, que notre démarche se poursuivra en présentant ce texte, ses possibilités de construction, et les analogies avec le manuscrit Voynich.

Une fois que seront clarifiées les étapes de construction concourant à une meilleure compréhension de l’objet du présent texte, nous ferons une critique sur les différentes méthodes de déchiffrement employées jusqu'à présent et ajouterons notre interprétation et les suppositions d’être des textes et illustrations.

La dernière étape sera, naturellement, ouverte, en donnant les failles probables contenus dans ce manuscrit, et les possibles clefs de lecture et de déchiffrement.

La conclusion sera ouverte, c’est-à-dire, une introduction à un nouveau chapitre, qu’il soit écrit par le présent auteur ou par une tierce personne.

La logique présentée est donc de comprendre le texte, son auteur, son contexte, son contenu… pour servir de trame logique à une étude (nécessairement ?) plus quantitative. Ne pas avoir peur de reprendre à la base une démarche entamée par des chercheurs est une motivation forte et enivrante à la fois. La tentation a été grande de compiler l’existant, les travaux des uns et des autres, avec leurs qualités et leurs défauts. Et puis, il faut l’avouer, la logique de tout reprendre à zéro l’a emporté. Bien sûr la vie de Roger Bacon, Kircher, … l’histoire de la cryptographie, … ne sont pas reprises ex-nihilo. Les sources d’informations ont été multiples. Ce qui compte ici est une logique visant à construire notre démarche : d’abord avoir les éléments en main, les connaître, les comprendre, dater le manuscrit ou tenter de le faire… être exhaustif et holistique dans la mesure du possible dans les interprétations mais en visant un objectif unique d’aboutir à une solution, et de n’être pas une simple revue et compilation d’articles sur le sujet.

Le manuscrit existe, a été écrit ; c’est une donnée factuelle et objective. L’interprétation ou les interprétations à ce jour, nous le verrons dans le développement qui suivra, ont été à la fois trop nombreuses et trop exhaustives. Il nous faudra construire notre démarche et laisser le moins possible le lecteur dans le doute au fil des pages qu’il lira. Ainsi, toutes ces pages devront être lues de la première à la dernière page, dans le sens le plus linéaire, et non pas d’un chapitre à l’autre, au gré de ses envies. Les chapitres sont solidaires les uns les autres, telle une histoire policière. Ceci pourrait alors paraître directif et contraignant, mais ceci est volontaire pour éviter au lecteur attentif et passionné d'être superficiel, et d'avoir, pourquoi pas, de nouvelles briques pour la suite des recherches.